“L’exposition dans ma tête”
Dans le cadre de cette réflexion, j’ai choisi un corpus d’œuvre qui illustre les dimensions et les dynamiques collectives propres à ces pratiques. Ce corpus permet aussi d’interroger leur portée politique et leur rapport à l’autonomie collective plutôt que l’individualisme capitalisé.
L’espace d’exposition est un vaste hangar industriel réaménagé pour offrir une expérience immersive. Les œuvres sont disposées de manière à inviter le spectateur à une navigation libre, reflétant l’autonomie en free party. Le public déambulera entre les différentes œuvres du corpus mêlé aux décors de free party.
La free party où “fête libre” défendue par les communautés Rave est un enjeu social et politique. Créer et s’organiser en dehors des lieux institutionnalisés. S’éloigner le temps d’un weekend des normes capitalistes de la société. C’est une pause, un espace-temps dans lequel les problèmes ne sont plus présents et où la liberté des corps est en effervescence. Tout se prépare en secret, rien ne se fait seule. Pour enrichir l'expérience, les organisateurs proposent des décors qui reflètent une libre expression artistique, empreint de différentes techniques et mouvements du monde de l'art. Les décors sont créés en fonction du thème de la soirée. L'objectif est aussi de pouvoir s'approprier le lieu et d'offrir aux gens un autre monde. C'est-à-dire un espace temps qui se détache du quotidien, un espace alternatif ou les normes économiques et sociales sont mises de côté. Les participants expérimentent un autre mode de vie en collectif. j’ai choisi de structurer cette réflexion autour de la free party en tant qu’acte de co-création. En quoi ces fêtes libres peuvent-elles devenir des espaces où collectifs, participants (teufeurs et intervenants) se rassemblent pour produire une expérience à la fois artistique et politique ?
The Weather Project, Olafur Eliasson, 2003
Lebensformen, Janine Bäckle, 2015
Il s’agit d’une installation qui a eu lieu en 2003 au Tate Modern de Londres, crée par l’artiste Olafur Eliasson. L’artiste installe un soleil artificiel, le plafond est recouvert de miroirs, accompagné d’une brume qui embaume l’espace. Ainsi, le lieu est transformé et il invite le public à y interagir librement. En créant un espace d’expérience collective, les participants on investit le lieu, certains ont fait des cours de yoga ensemble, quelqu’un a ramené un canoë… Lors de la visite du président George W. Bush le public à former une phrase allongé sur le sol “BUSH GO HOME !”. Cette installation permet de faire le lien avec les free party puisqu’elle montre l’importance de l’expérience collective, ainsi que l’autonomie laissée au public pour investir cet espace.
L’artiste est engagé (écologie), il propose un regard sur notre rapport à la nature. Cet engagement politique est aussi quelque chose qu’on retrouve en free party. Les collectifs à l’origine des free party portent un message politique à travers leurs créations.
La photographe Allemande est allée à la rencontre de la communauté éphémère des Rainbow Gatherings. Ils défendent un mode de vie libre, écologique et pacifiste. Elle propose une série de photographies douce, jouant avec la lumière, l’atmosphère de la foret et du rapport nature/corps. Cette série s’accompagne de texte rédigé à la main par les personnes présentent qui se livrent sur cette communauté et ce mode de vie.
Cette exposition explore la free party comme un acte de co-création. Les free parties, comme les œuvres présentées, se définissent par une dimension participative essentielle, mélangeant collectifs et participants pour produire des espaces où création artistique et engagement politique se rencontrent.
On pourrat aussi retrouver différentes séries photographiques sur les décors de free party et sur les collectifs qui les crées.
C'est photographies sont issu de mon travail de création dans le cadre de ma recherche.
Serralongue documente les sorties des naturalistes en lutte sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes entre 2015 et 2017. Il adopte une approche participative en devenant accompagnateur plutôt que témoin distant, soulignant l’importance du processus dans l’acte photographique.
Mots clé
Fête
Free party
Co-création
Participatif
Communauté
Comptes rendus photographiques des sorties des naturalistes en luttes sur la ZAD de Notre Dame des Landes, Bruno Serralongue, aout, 2015- avril 2017
“Une fois dans la place, il adopte le point de vue de l’accompagnateur, non celui du témoin privilégié”
Ardenne, 2003, Bruno Serralongue p9
« Serralongue n’attend pas ses sujets, à l’inverse des innombrables archivistes du banal, mais il va à leur rencontre : le trajet effectué [...] fait partie intégrante de ce “matériau”. »
Nicolas Bouriaud, 2003, Bruno Serralongue p15
Photographe allemand, Tillmans explore l’engagement politique et l’activisme artistique. Dans son travail sur les raves, il capte l’essence de ces espaces collectifs à travers des clichés vibrants. Sa démarche fait écho à l’idée d’art comme caisse de résonance, notamment pour des causes politiques. Dans l’entretien exclusif avec le photographe : “Je veux rendre l’activisme attractif” pour les Inrokuptibles, publié le 13 mai 2018 il aborde différentes problématiques sur ses pratiques en tant qu’artiste européen engagé. Il insiste sur le fait que ces créations sont des engagements et le seront toujours. Pour qualifier ses œuvres d’un point de vue politique, il utilise les termes de “caisse de résonance”.
Ainsi, il soutient l’importance de rendre attractif l’activisme via ses œuvres. Et de cette manière, il encourage les citoyens à se mobiliser pour faire valoir leurs revendications politiques. C’est en questionnant la place de l’artiste que son art prend forme dans des enjeux sociaux, politiques. Tillmans veut normaliser les minorités invisibles. Il donne une place à ses groupes cachés dans l’ombre des dominants. Lorsqu'il s'intéresse aux rave-party , même si celles-ci aujourd'hui font parties du paysage culturel allemand à l'époque, les ravers restent une minorité.
Cette manière de faire la fête, de danser, Tillmans la photographie à plusieurs reprises. Il ne cherche pas à montrer l'extravagance, de ces soirées, mais au contraire à mettre en avant les banalités qui les constituent. Cette liberté de danser est, comme nous le dit Tillman dans cet entretien, perçu comme une provocation, de plus elle est une remise en question par l'extrême droite. C'est ainsi qu'à travers son travail, il appelle à se mobiliser, à devenir activiste pour défendre cette culture underground.
À travers ses photographies de raves, il capture l’énergie qui s’en dégage. On ressent l’atmosphère de ses soirées, leur dynamisme et l’esprit de liberté qui s’en dégage. Le photographe se concentre sur les mouvements des corps, les expressions des danseurs. À travers les jeux de lumière et les couleurs vivent de ses photographies, il nous transporte dans une expérience sensorielle.
The boat project, est porté par les artistes Gregg Whelan et Gary Winters, qui lance un appel à contribution dans le but d'obtenir des morceaux de bois. Tout le monde peut participer au projet, la seule règle étant de ramener un objet en bois qui raconte un bout de votre histoire personnelle. Les artistes collectent un grand nombre de bois selon un protocole bien précis. Il fallait raconter l’histoire de votre morceau de bois, la conversation est enregistrée. Les participants sont photographiés avec leur morceau de bois qui est ensuite numéroté. Durant un an, ils construisent un bateau dans un hangar ouvert tous les jours. La finalité du projet n’est pas centrée sur l’objet finit (le bateau) mais sur le processus de création, le partage et les rencontre.
Chaque participant contribue à façonner un espace commun, le projet s’inscrit dans une démarche collective qui valorise les récits personnels et où chacun apporte sa pierre à l'édifice. Et comme dans le monde de l'art traditionnel, lorsqu'il faut créer les décors des free party, les pratiques artistiques se rencontrent. Chacun apportent son savoir-faire et différentes techniques sont utilisées tel que la peinture, le graphe, la scierie, la soudure, le collage, voire la connectique électrique. Ce qui y fait œuvre en free party, c'est l’interconnexion entre les teufeurs, l’art visuel (scénographie : décors, lumières) et les D.J.
The Boat Project, Gregg Whelan et Gary Winters, 2011-2012
Wolfgang Tillmans
Marie Rouge
Cette photographie dégage de la douceur. Au milieu d’une foule coloré, deux femmes s’embrassent. Le point de netteté de la caméra est dirigé sur elles. Leur peau nue est rosée par les néons de la soirée. Elles s’agrippent entre elles, comme s'ils leur étaient impossibles de se lâcher. En tant que spectatrice, j'ai l’impression de rentrer dans un moment de légèreté en opposition avec la foule.
Autour donc une foule mouvementée et colorée qui ne semble pas prêter attention à ce qui attire notre regard de spectateur. Dans cette ambiance rose, une lumière verte se déploie à contre-jour. Cette lumière forme comme un halo au-dessus. Les couleurs sont éclatantes et cette vibrance laisse penser qu’ici, on ne se cache pas dans la peine ombre des soirées.
Les corps se mélangent et leurs peaux est apparente. Nos deux protagonistes sont seins nus. Libre de toutes injonctions sociales et libre de vivre leur idylle sous les feux des projecteurs de la soirée. La profondeur de champs permet de mettre l’accent sur leur présence et le lien qui parait les unir.
Mon imaginaire me pousse à imaginer ce qui pourrait se passer en dehors du cadre de la photographie. Une foule en pleine effervescence, des rencontres, des corps qui s’enlacent.
Ce travail photographique traite de l’intime et de notre rapport à l’autre. Les soirées Wet for me connue pour être des “safe place” pour la communauté lesbienne rassemblent et permettent d’obtenir des images douces, joyeuse et bienveillante.
Chahinez gadari
Marie Rouge photographe notamment pour les soirées Wet for me, organisé par le collectif lesbien Barbi(e)turix à Paris depuis 2008. La fête est clairement engagée, la directrice artiste met en avant des artistes (DJ) féminine ainsi que la communauté LGBTQIA+
En plus de ce travail photographique, je met en place des ateliers de création au seins de la communauté free party. L'objectif étant de faire un ouvrage à partir de mes photographies de free party issu de la co-création. Je documente ces ateliers. Dans l'exposition, le livre se trouverait sur un socle, les spectateurs pourrait le consulter.
Nina Arlaut 20005189